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Le blog de François MUNIER

Juin 1940. Des combats à front renversé près de Luxeuil (3/)

13 Décembre 2024 , Rédigé par François MUNIER Publié dans #Histoire, #Histoire du 79ème RI, #Guerre 1939-1945, #Franche-Comté, #Haute-Saône

Après avoir expliqué comment les éléments prélevés sur la 79ème RIF présent sur la  ligne Maginot pour combattre l'armée allemande déjà bien avancée en France se retrouvèrent dispersés, je cite un autre témoin qui raconte les combats de Breuches et Faucogney.

Le bataillon de marche du 79e RIF en Juin 1940

Laissant une partie du 79e RIF sur les positions, le reste de l'unité sous les ordres du Colonel RETHORÉ embarque le 14 juin 1940 en gare de Walbourg dans quatre rames.
Voici ce que contenaient ces rames :
1ère rame : l'Etat-Major et une partie du bataillon de marche BONNET, soit :
13 officiers, 350 gradés et hommes, 2 médecins.
2ème rame ; les compagnies de mitrailleuses de ce bataillon.
3ème rame : le reste de ce bataillon BONNET plus un compagnie de F.V. sous le commandement du Lt ALLARD.
4ème rame : le bataillon du marche MACKER, soit 17 officiers, 638 gradés et hommes, 3 médecins.
Sont aussi embarqués sur ces rames, les canons de 25 et leurs chenillettes, les mortiers avec leurs voiturettes et leurs chevaux.
Par contre les fourragères tirées, à un train de sénateur, par de solides chevaux, reçurent de l'Etat-Major un ordre de marche et un point de chute où les bataillons pourront les récupérer. Elles sont chargées de ravitaillement.
Les camionnettes sous les ordres du Lt HARTMANN reçurent elles aussi leurs directives.
Le drapeau du Régiment confié au sous-officier André PERRIN est emmené par une camionnette du ravitaillement.
Ce train-auto transporte les moyens essentiels de l'unité : transmissions, munitions de réserve, une grande partie des vivres, les sanitaires et tout le matériel médical.
Voyons vite, avant de nous occuper des rames ferroviaires, de ce qu'il advint de ces convois pour autant que nous aillons pu être renseigné.
Ils furent vite noyés dans le flux routier à travers les Vosges.
Et, oh surprise, quelques véhicules hippo furent récupérés à Schirmeck par le Bataillon MACKER.
Le convoi-auto arrive à franchir la trouée de Belfort avant que les Allemands ne la verrouillent, à Besançon c'est sous le nez de l'ennemi qu'il passe et à St Loup il arrive à éviter une catastrophe.
Tout le convoi, ou presque, rejoint le C.M.202 d'Epinal, replié à Thezac dans le Lot et Garonne, le jour de l'armistice. Le drapeau de l'unité est sauvé.
Mais les matériels transportés, si précieux pour le bataillon au combat sont définitivement perdus pour lui.
Et ce bataillon qu'est-il devenu dans ce repli où la circulation ferroviaire est tout excepté fluide.
Nous avons un compte-rendu du Général HOGARD relatant le chemin suivi par les rames du détachement BONNET.
Le mouvement s'effectue d'abord en direction de St-Dié ; on ne sait pas exactement où l'on va : le bruit a couru, mais sans confirmation, que l'on doit rejoindre la région de St-Dizier. Le train avance lentement. Ce n'est que le 16 à 6 heures, après un très long arrêt pendant la nuit du 15 au 16, que l'on arrive à Epinal. Vers le milieu de la matinée, on s'arrête à hauteur d'Aillevillers. Un chapelet de bombes d'avions tombe à huit cents mètres environ du train. On traverse la gare détruite où il ne reste qu'un seul agent de la S.N.C.F.. Toujours lentement, on atteint la gare de Conflans-Varigney qui est vide.
Les trains militaires se suivent à vue directe.

Des fugitifs suivent la route qui longe la voie ferrée : ils donnent des renseignements confus et contradictoires.

Vers 12h30, au cours d'un arrêt, on entend un poste radio dans un café. Il annonce que l'ennemi a atteint Gray coupant ainsi le régiment de la région qu'il devait rejoindre. Il est alors décidé de poursuivre le mouvement sur Port d'Atelier.

Le train repart, mais se trouve assez vite bloqué devant Port d'Atelier par plusieurs train arrêtés les uns derrière les autres.

Impossible d'avancer : des occupants de ces trains descendent et commencent à refluer vers l'arrière.

Le bruit court que les Allemands sont à Port-d'Atelier. Une reconnaissance faite en moto confirme le renseignement : on ne peut songer, avec les éléments transportés, à forcer le passage. Il est décidé de regagner Conflans où il existe un quai de débarquement et de débarquer pour tenter de se raccrocher à un groupement combattant dans la région.

L'exécution est pénible. Derrière le détachement de nouveaux trains sont arrivés, rendant très difficile toute manœuvre. On réussit cependant à arriver à Conflans, et l'on débarque en même temps qu'un détachement du 26ème R.A..

Actuellement ce minuscule chantier de débarquement datant de 1914/1918 est dépourvu de rails : le tout est embroussaillé. Le bâtiment de la gare sert de dépôt à une entreprise privée.

Le Lieutenant BOUILLOC est envoyé en moto chercher un contact à Luxeuil. Il trouve là le Général OEMICHEN, Directeur des Etapes et le Colonel CRUZE du 69ème R.A, du secteur de Hoffen qui vient d'arriver par la route.. Ce dernier a reçu l'ordre du Colonel DULUC, chargé par la Vllème Armée de regrouper les unités arrivant dans la région, et commandant un Groupement de combat, de tenir Luxeuil, en assurant la couverture face à l'ouest, direction d'où l'on craint l'arrivée de l'ennemi. La mission exacte du Colonel DULUC est de couvrir, face à l'ouest, le flanc de la Vllème Armée, sur le front Lure - Luxeuil - Fougerolles et d'interdire ensuite les axes Lure - le Thillot - Luxeuil - Rupt - Plombières - Remiremont puis les passages de la Moselle.
Au Colonel RETHORE, échoit celle de défendre Luxeuil puis de mener un combat retardataire sur l'axe Luxeuil - Rupt-sur-Moselle. En plus du détachement du 79ème R.I.F., il disposera des 2 groupes d'Artillerie du 69ème R.A. (un groupe de 75 et un de l55), 2 sections de chars R. 35 (Lieutenant MICHALET), de quelques chars F.T , (Capitaine MORIN), enfin de quelques éléments divers qui se joignent à lui (pionniers), du 200ème Bataillon autonome du Commandant FARAUD, (cyclistes – forestiers). Des unités polonaises doivent prolonger sa droite, vers Fougerolles (5ème Chasseurs Polonais).
En exécution de ces directives, le détachement se porte sur Luxeuil.
Les éléments d'artillerie sous les ordres du chef d'escadron CRUSE sont motorisés.
Le 200ème Bataillon autonome de Protection est à très faible valeur militaire.
Les chasseurs polonais (150 hommes), après de durs combats ont perdu entre autre le sous-lieutenant KRYWIECKI en défendant les bords de la Saône.
Les chars viennent du même secteur. Ce sont deux compagnies, l'un avec ses R35 du Lieutenant MICHALET, l'autre avec ses vieux F.T. du capitaine MORIN.
Le détachement du 79ème R.I.F, bivouaque dans une forêt aux lisières de Luxeuil.
Schéma sur fond de carte IGN 1950, avec les lignes SNCF

Schéma sur fond de carte IGN 1950, avec les lignes SNCF

Actuellement ce minuscule chantier de débarquement datant de 1914/1918 est dépourvu de rails : le tout est embroussaillé. Le bâtiment de la gare sert de dépôt à une entreprise privée.

Le Lieutenant BOUILLOC est envoyé en moto chercher un contact à Luxeuil. Il trouve là le Général OEMICHEN, Directeur des Etapes et le Colonel CRUZE du 69ème R.A, du secteur de Hoffen qui vient d'arriver par la route.. Ce dernier a reçu l'ordre du Colonel DULUC, chargé par la Vllème Armée de regrouper les unités arrivant dans la région, et commandant un Groupement de combat, de tenir Luxeuil, en assurant la couverture face à l'ouest, direction d'où l'on craint l'arrivée de l'ennemi. La mission exacte du Colonel DULUC est de couvrir, face à l'ouest, le flanc de la Vllème Armée, sur le front Lure - Luxeuil - Fougerolles et d'interdire ensuite les axes Lure - le Thillot - Luxeuil - Rupt - Plombières - Remiremont puis les passages de la Moselle.
Au Colonel RETHORE, échoit celle de défendre Luxeuil puis de mener un combat retardataire sur l'axe Luxeuil - Rupt-sur-Moselle. En plus du détachement du 79ème R.I.F., il disposera des 2 groupes d'Artillerie du 69ème R.A. (un groupe de 75 et un de l55), 2 sections de chars R. 35 (Lieutenant MICHALET), de quelques chars F.T , (Capitaine MORIN), enfin de quelques éléments divers qui se joignent à lui (pionniers), du 200ème Bataillon autonome du Commandant FARAUD, (cyclistes – forestiers). Des unités polonaises doivent prolonger sa droite, vers Fougerolles (5ème Chasseurs Polonais).
En exécution de ces directives, le détachement se porte sur Luxeuil.
Les éléments d'artillerie sous les ordres du chef d'escadron CRUSE sont motorisés.
Le 200ème Bataillon autonome de Protection est à très faible valeur militaire.
Les chasseurs polonais (150 hommes), après de durs combats ont perdu entre autre le sous-lieutenant KRYWIECKI en défendant les bords de la Saône.
Les chars viennent du même secteur. Ce sont deux compagnies, l'un avec ses R35 du Lieutenant MICHALET, l'autre avec ses vieux F.T. du capitaine MORIN.
Le détachement du 79ème R.I.F, bivouaque dans une forêt aux lisières de Luxeuil.

Journée du 17 juin

Le capitaine BONNET reçoit ordre du Colonel RETHORE d'établir un ceinture défensive autour de Luxeuil avec les 350 hommes du bataillon.
Un point d'appui avec deux groupes de voltigeurs et deux canons de 25, sous les ordres du Lieutenant DURANT est au nord de la ville et barre ainsi les routes de Fougerolles et de St-Loup.
Un point d'appui avec un groupe de voltigeurs, un groupe de mitrailleuses et un canon  de 25 sous les ordres de l'Aspirant GARNIER interdit la route de Port S/Saône et le pont sur le Breuchin.
Un point d'appuis avec un groupe de mitrailleuses, un F.M., un canon de 25 sous les ordres du s/Lt LECLERE est à Ormoiche.
On promet à ce dernier le soutien de trois chars F.T.. Ils ne viendront pas ce jour là.
Le P.C. du Capitaine BONNET est aux lisières S.E. de Luxeuil sur la route de Faucogney.
Celui du Colonel RETHORE s'installe d'abord à la mairie puis à Froideconche (Est de Luxeuil), à partir de 17h.
Le 200ème Bataillon de Pionniers garde les issues de Luxeuil et s'occupe à créer des obstacles (abats d'arbres).
Le groupe de 75 (Commandant KERGARADEC) est en défense contre engins blindés aux lisières ouest de Luxeuil et de St-Sauveur.
Deux postes de secours sont installée, l'un à Luxeuil, l'autre à St-Sauveur.
Le Colonel RETHORE rend compte de ceci au P.C. de Faucogney où se trouve le Colonel DULUC commandant le secteur défensif. Celui-ci attire l'attention sur le fait que depuis le 16 juin les allemands ont pris Vesoul et que Luxeuil peut être attaqué par le Sud, Vesoul n'est qu'à 30 km.
De nouveaux points d'appui sont établis :
Un point d'appui à la sortie de St Sauveur vers Vesoul avec 3 canons de 25 et deux groupes de voltigeurs commandés par le Lt FIX.
Un point d'appui sur une partie du terrain d'aviation avec deux groupes de mortiers de 81 et un groupe de voltigeurs commandé par le Lt CONTAL.
Un point d'appui au stade municipal de Luxeuil défendant l'ouest de la ville, avec 2 canons de 25 et un groupe de voltigeurs commandé par l'aspirant BARUE.
Huit chars F.T. et deux sections de R35 (Lt MICHALET) sont en réserve à la lisière des bois au S.E. de St Sauveur.
La population est inquiète, voilà ce qu'écrit un de ses habitants en 1949 :
Le 16 juin, la radio annonça la prise de Gray, Chaumont. Personne n'espérait plus que la région luxovienne échapperait à l'invasion. Au cours de la nuit du 16 au 17 juin, un officier vint organiser le plan de défense de St-Sauveur. Le 72e régiment d'artillerie d'Epinal venait assumer la résistance avec le 200e régiment d'infanterie. Des canons et des tanks s'installaient aux abords du village. Des obus s'amoncelaient dans les rues. Quelques unes d'entre elles étaient défendues (!) par des barrages.
Tout est en place.
Nous avons pu consulter les comptes-rendus du Lt CONTAL et de l'aspirant GARNIER.
Nous avons rendu visite au Lt FIX.
Nous nous sommes rendu sur les lieux. Voyons les résultats de notre visite sur place.
P.A. d'Ormoiche (Lt LECLERE) c'était un poste perdu . En cas de difficultés il pourra soit se retirer sur le village, exécuter un baroud d'honneur en exposant la population, soit tenir jusqu'à la nuit et par un terrain plat comme un billard rejoindre l'aspirant GARNIER, soit disparaître dans la nature en utilisant tous les défilements.
P.A. du Pont de Breuches (aspirant GARNIER)
Un virage concave, en face du pont vers Bronches. La route mène d'Ormoiche à Luxeuil.
Dans ce virage, sur un faux plat adossé à un talus, est installé le P.A-, coupé en deux par un chemin creux sur lequel un ennemi, embusqué à Bruches, a des vues. En direction d'Ormoiche quelques masures bouchent la vue.
Le pont enjambe une petite rivière coulant dans un lit aux pentes abruptes (profondeur 2 à 3 mètres) le Breuchin.
Du pont vers le P.A., une petite route de 100 mètres, bordée d'un coté par un haut mur (2.5m) en brique, mur qui se continue ensuite vers Luxeuil sur une grande longueur. Ce mur est éloigné du P.A. de 20 à 25 m.
Voilà ce que dira le rapport de l'aspirant.
Le 17 juin 1940, à 20h30, le colonel est passé disant : « c'est ici que vous vous battrez, installez-vous ».
J'ai fait au cours de la nuit aménager une barricade sur le pont (en avant du pont exactement). J'avais récupéré des F. M. abandonnés mais en parfait état de marche ; je les ai fait mettre en batterie sur mes flancs, l'un battant la route d'Ormoiche, l'autre celle de Luxeuil, ma mission principale restant l'interdiction du passage du pont, mission assurée par un canon de 25 protégé par deux mitrailleuses
Toute la nuit s'est passée à creuser les emplacements. Au jour nous avions quelque chose d'à peu près convenable.
Plus de cinquante ans après, en visitant ces lieux, nous n'arrivons pas à comprendre le Colonel RETHOR d'avoir placé ce P.A. dans une position aussi défavorable.
Le P.A. du Lt DURANT ne peut plus être situé actuellement. Tout a été changé : une belle route, des pavillons plaisants.
En tout cas ce soir là dans ce P. A-, tous sont inquiet.
Le groupe de canons de 25 du sergent HALBWACHS n'a pas rejoint. Le Lt DURAND, pour arrêter un ennemi motorisé n'a que deux F.M., il est donc nu.
Et comment est-ce ailleurs ?
Le compte-rendu du Lt CONTAL à son Cdt de Compagnie le Lt LAMOUREUX nous renseigne.
« Je dois aller prendre position avec deux groupes de mortiers de 81 au nord du terrain d'aviation, près de St-Sauveur, au sud de Luxeuil. Nous y sommes à 17 heures, tandis que chevaux et voiturettes sont dans une grange du village. Je place les pièces dans deux carrières attenantes. Mon observatoire sera le balcon d'une petite maison séparée de la carrière par une route. Ne disposant d'aucun moyen de transmission, j'établirai un relais pour commander au geste et à la voix.
Vers 18 heures, le colonel RETHORE et le capitaine BONNET viennent me voir. Je leur indique les positions de mes armes, mon observatoire et demande des renseignements sur l'ennemi et les liaisons à assurer. Renseignements : on ne connaît rien de précis sur l'ennemi.
Cependant le capitaine BONNET me demande de préparer des tirs en direction de la vallée de la Lanterne et sur la partie de la voie ferrée qui borde le terrain d'aviation à l'est. Le colonel me promet le téléphone de mon observatoire aux pièces pour le lendemain. Liaisons : à côté de nous, deux pièces de 75 du 69ème RA ( batterie du capitaine RECASSENS). A droite et à gauche : rien. Derrière nous, le lieutenant FIX, avec ses 25, tient le carrefour au centre de St-Sauveur, Les deux autres pièces de la batterie de 75 se trouvent également sur le point d'appui.
Un peu plus tard, je reçois un groupe de F. V. envoyé par le colonel. En raison de notre isolement, je le tiens en réserve afin de Importer vers le point menacé. Le soir, j'établis un tour de garde et nous nous couchons dans les abris des aviateurs creusés dans les parois de la carrière. Je fixe le réveil à 4 heures car j'ai l'impression, intuition plutôt, que le lendemain, il y aura du nouveau. »
Nous sommes allés voir ce terrain d'aviation. Tout est changé.
Une grande base aérienne est en place et remplace ce petit terrain occupé d'abord par un groupe aérien d'observation n° 507 puis par un groupe de chasse (2/7) de Dijon.
Madame ANDING, responsable des personnels civils de la base, nous à envoyé une carte de ce terrain,  dont vous trouvez in extenso une copie, ainsi que quelques rapports.
Revenons au Lt CONTAL, qui fatigué, s'est endormi.
« Vers 21 heures, je suis réveillé aux cris de «alerte». Un lieutenant d'artillerie est là qui me rapporte que ses sentinelles aperçoivent des hommes sur la partie du terrain. Il s'agissait du sergent GUERINGER, chef de groupe de mortier qui avait pris l'initiative d'une patrouille. Rassuré, le lieutenant me demande si nous avons mangé. Sur ma réponse négative, il fait distribuer  des  conserves  à  mes  hommes  et  m'invite.  Je  rencontre  alors  le  capitaine RECASSENS qui me dit n'avoir comme moi, aucun renseignement sur l'ennemi. Je lui communique ma certitude de la bataille proche qui me fait placer tout le monde aux emplacements de combat dès 4h30. Il décide de faire de même. »
Le P.A. de St-Sauveur nous a été décrit par le Lt FIX a qui nous avons rendu visite.
Les multiples missions à couvrir par ses trois canons de 25 sont :
- les routes du Vesoul et de Lure
- défendre les arrivées vers Bruches
Pour ses 2 F. M. les missions sont :
- se sécuriser vers Bruches
- couvrir le vallon du ruisseau Lanterne
- se couvrir vers les forêts
Cela fait pas mal d'objectifs pour ce P.A.
Le lieutenant FIX a un seul soucis ce soir-là : ses groupes n'ont pas grand chose à manger. Son P.C. est situé près du passage à niveau. Nuit tranquille.
Le Lt Colonel RETHORE termine sa soirée en visitant ses défenses. Lui aussi a de gros soucis.
Son dispositif est léger, fragile.
L'inventaire des matériels
l groupe de 75
7 canons de 25
2 mortiers de 81
4 mitrailleuses
10 F.M.
et quelques chars en réserve.
Pas de mines, pas de grenades, une liaison précoce (téléphone civil et agents de liaison)
Journée du 18 juin 1940.
Il a plu la nuit, peu de visibilité. Pas de surprises nocturnes de la part de l'adversaire.
Mais ce calme apparent ne dure pas.
En effet c'est sur divers sites que les opérations vont commencer. Sérions-les
Journée du 18 juin 1940.
Il a plu la nuit, peu de visibilité. Pas de surprises nocturnes de la part de l'adversaire.
Mais ce calme apparent ne dure pas.
En effet c'est sur divers sites que les opérations vont commencer. Sérions-les

a) Combat de St-Sauveur-Luxeuil

Nous avons un résumé du général HOGARD. Il dit :
« A 5 heures, une colonne blindée ennemie, venant par la route de Baudoncourt, arrive à hauteur des hangars du terrain d'aviation. La route est barrée par des arbres abattus. Les chars se déploient à l'extrémité du terrain d'aviation, au nord de la route, et ouvrent le feu. La batterie de 75 riposte, détruit plusieurs engins. La section de mortiers, de son côté, prend sous son feu une colonne d'infanterie sur camions, qui s'est arrêtée derrière les chars ; un camion prend feu. Les autres font demi-tour.
A 6h30, le commandant du bataillon se rend à St-Sauveur avec le Capitaine MORIN, commandant les chars FT. Celui-ci place ses chars aux lisières ouest du village. Les chars ennemis sont alors à 800-1000 mètres. Le combat se poursuit. Un char FT est détruit.
Le Commandant prend contact avec le Lt FIX, avec le Commandant KERCARADEC et le Capitaine RECASENS du 69ème R.A.. Des éléments d'Infanterie déployés sont repérés sous les couverts qui bordent le Breuchin au nord de Breuches. Une reconnaissance menée par des chars R.35 du Lieutenant MICHALET ne constate, sur 1500 m, en direction de la rivière, aucune progression ennemie.
Ordre est alors donné à la Compagnie FT d'intervenir sur l'axe Luxeuil-Ormoiche pour dégager les points d'appui au contact (Pont de Breuches-Ormoiche).
Vers 911, l'Infanterie allemande se porte en avant d'une part par la vallée du Breuchin, d'autre part par les lisières Est du terrain d'aviation. Accompagnée de chars elle s'efforce de déborder la défense de St-Sauveur. Nos armes automatiques trop peu nombreuses, ne réussissent pas à enrayer cette manœuvre.
Vers 10h45, l'ennemi a atteint la route entre Luxeuil et St-Sauveur, ainsi que les lisières sud de Luxeuil et tient sous son feu le pont qui relie ces deux localités. Il a débordé le terrain d'aviation par le nord. A cette même heure, le Lieutenant LAMOUREUX qui venait rendre compte au Poste de Commandement est fait prisonnier au pont. Toutes liaisons sont coupées avec St-Sauveur.
A l lh30, ordre est donné aux artilleurs de se replier. »
Nous nous reportons pour plus de détails au rapport du Lt CONTAL.
« A 4 heures, le 18 juin, je fais un tour sur le terrain d'aviation. A 4h45, une colonne comprenant des chars et des camions arrive sur la côté de Baudoncourt (route de Vesoul à Luxeuil) et s'arrête à quelques centaines de mètres : les artilleurs avaient dressé des obstacles sur la route.
Nous ne savons pas encore ce que c'est, mais après quelques secondes, nous sommes fixés. L'ennemi arrose devant lui. Aussitôt, la pièce de75 placée dans un hangar à 50 mètres à l'est de la route entre en action. Elle détruit les premiers blindés. Mes mortiers tirent sur des camions restés en arrière et l'un d'eux flambe. Les autres font demi-tour. J'observe par un balcon situé au premier étage de la maison. Les allemands canonnent immédiatement le château d'eau placé en bordure de la carrière, au sud, ainsi que la maison isolée où je me trouve. En effet mes gesticulations n'ont pas passé inaperçues.
Le château d'eau est touché en plein. Heureusement, personne n'est en haut. Le premier obus qui atteint la maison perce le mur à un mètre à ma droite. Il éclate dans la pièce voisine démolissant la cloison. Je suis couvert de morceaux et de poussières de brique mais je n'ai q'une blessure superficielle à la jambe droite. Je descends à la cave et le tir cessant sur la maison, je remonte après quelques minutes. Le Lieutenant d'artillerie vient alors avec moi. A ce moment, le tir reprend sur la maison et sur nos positions. Le Lieutenant est blessé à la figure par un petit éclat qui lui ouvre une grande partie de la lèvre supérieure. Je n'avais rien.
Malheureusement, la pièce de 75 qui bat la route, repérée, est atteinte de plein fouet. Tous les servants, sauf un, sont touchés.
Une accalmie survenant, je vais voir mes hommes. Personne n'est blessé. Un seul a eu la capote arrachée à une épaule.
Vers 8 heures, l'ennemi a allongé son tir. Le Lieutenant FIX vient me voir en dépit des obus qui éclatent encore de temps à autre au-dessus des carrières. Je lui donne un court compte-rendu destiné au Lieutenant LAMOUREUX.
Pour surveiller les mouvements ennemis, je retourne dans la maison et observe de l'intérieur du premier étage détruit. Un sous-lieutenant d'artillerie était venu remplacer le lieutenant blessé. C'est alors qu'un char Renault d'un modèle ancien, venu nous appuyer, est rapidement hors de combat (c'est le FT du rapport HOGARD).
Un peu plus tard, je remarque au sud du terrain, avançant vers nous, deux chars et de l'infanterie progressant par bonds.  Le second 75  placé à une vingtaine de mètre de l'observatoire et resté intact, tire ainsi que le F.M..
Ce canon est bien protégé par des sacs de sable. L'ennemi n'insiste pas. »
La maison observatoire du Lt CONTAL fût détruite après la guerre en raison des nombreux bombardements et impacts collectionnés par elle. Elle appartenait à la famille Andreoli Mario, entrepreneurs de construction.
Parole est donnée au Lt CONTAL.
« A 11 h 30, j'aperçois une fusée lancée du village. N'ayant pas le code des  signaux, je fais rester tout le monde en place.
A midi trente, FIX vient me prévenir lui-même de l'ordre de repli. Nous abandonnons sacs et cantines pour emporter matériel et munitions à dos.
Je laisse le F.M. avec le sergent-chef GUISLAIN pour nous couvrir. Le groupe nous rejoint 10 minutes après au carrefour de St-Sauveur que FIX a ordre de tenir encore. »
Ce mouvement fut exécuté difficilement l'ennemi étant omniprésent.
Nouvel objectif pour le Lt CONTAL : couvrir les arrières du P.A. du Lt FIX dans le centre même de St-Sauveur.
Le Lt FIX ce matin là, a par deux fois eu un bon ange-gardien. Ecoutez plutôt :
St-Sauveur est bombardé par intermittence. Un arbre est touché. La couronne arrachée, bouche la vue à un canon de 25. FIX et un de ses hommes y vont pour déplacer l'obstacle. Un obus ennemi s'en charge ! Aucune égratignure pour les deux hommes. Un peu plus tard appuyé contre un poteau télégraphique, il observe à la jumelle la RN57. Il se lève, se déplace. Un obus arrive, plus de poteau !
Merci ange-gardien
Et la bagarre continue. Rapportons-nous toujours au Lt CONTAL.
« Mes mortiers ne peuvent plus me servir à l'intérieur du village. Je place le F.M. dans une maison, m'arme d'un mousqueton car les allemands, nous ayant tournés par notre droite, sont dans la partie nord du village, coupent la route de Luxeuil. Avec quelques hommes, j'avance, rasant les murs, mais nous ne pouvons parcourir plus de 50 mètres, les Allemands interdisant le passage à l'endroit où la me décrivait une légère courbe. Le sergent STOSS, du premier bataillon, le soldat GANGLOFF pénètrent dans les maisons en passant par les jardins. Ils tirent par les fenêtres et surprennent l'ennemi. STOSS abat cinq allemands. N'ayant plus de cartouches, il descend dans la nie pour chercher le fusil d'un mort, afin de continuer la lutte. GUERINGER tire, agenouillé sur le trottoir. Je suis couché de l'autre coté, quand je n'ai plus de cartouches, il m'en lance une poignée. Je vois toujours basculer le premier soldat vert que j'abattais. Il ajustait GUERINGER, à 40 mètres, mais je fus plus rapide que lui. Les obus éclatent sur les toits et les tuiles voltigent un peu partout. »
« Le conducteur DENIS qui avait récupéré un cheval de la maison démolie où étaient restées nos voiturettes fut blessé à la tête mais put se relever. Le soldat PAQUET, d'une pièce de 25, reçut un éclat d'obus dans le ventre. Le soldat SCHISTER, le casque entaillé par une balle au-dessus de l'oreille droite, n'avait aucune blessure. Les artilleurs avaient eu moins de chance, les servants d'une pièce ayant été touchés. »
Grâce à l'appui de quelques chars qui étaient venus nous prêter main forte, nous étions à peu près tranquilles vers 15 heures. FIX pouvait alors assurer le repli sur Faucogney, grâce à ses chenillettes et quelques camions d'artillerie. Nous emportions armes et munitions.
Un médecin lieutenant nous dit : « je reste pour soigner les blessés que vous n'emmenez pas. »
b) Ce médecin a pratiqué jusqu'à sa retraite à Nice. Un crac parait-il.
Un obus détruit un canon de 25 du Lt FIX et fait trois blessés. Le PA se replie sans avoir pu tirer une seule cartouche, un seul obus.
A St-Sauveur, la rue dont parle le Lt CONTAL est large, bordée de maisons de un à deux étages. Nous l'avons arpenté avec respect.
Les habitants de St-Sauveur n'étaient guère rassurés. Voilà ce que l'un d'entre eux a écrit en 1949.
« Le 18 juin 1940, vers 5h, les allemands commencèrent à tirer sur le village. En quelques minutes, il fut désert. La majorité des habitants s'étaient réfugiés dans les villages et les bois voisins. La minorité restante gagna rapidement les abris.
La bataille fît rage. Heures de mortelle angoisse durant lesquelles des soldats français défendirent vaillamment le village. Hélas la lutte était trop inégale. Vers 15h, l'ennemi prenait possession du village. Les habitants quittaient les abris et relevaient les morts. 13 soldats avaient donné leur vie. Le cimetière communal les accueillit après que des mains malhabiles eurent, de leur mieux, creusé des tombes et fabriqué des cercueils car les ouvriers faisaient défaut.
Six de ces combattants ont été, après la guerre, réinhumés dans leur pays à la demande de leur famille. Les tombes des autres continuent à être entretenues par la municipalité et fleuries par les habitants et les élèves de l'école de filles.
La population civile n'eut à déplorer aucune victime.
Les maisons de Messieurs Prosper CANTE et MENNETREY furent complètement détruites.
D'autres furent sérieusement endommagées. Presque toutes reçurent des éclats.
Et l'asservissement commença. »
Un autre rapport du prêtre de St-Sauveur nous rapporte :
« Le mardi 18 juin 1940, nous étions réveillés à 4h du matin par une brève canonnade ;c'était l'arrivée des allemands sur la route de Reudoncourt. Comme un régiment d'artillerie française s'était mis en position de combat à St-Sauveur la bataille s'engageait. Toute la journée on entendit les crépitations des mitrailleuses et les éclatements d'obus.
Ce ne fut qu'à 4h de l'après-midi que les allemands pénétrèrent dans le village. Ils arrivaient par la route de Vesoul. Grâce à la prudence de mes paroissiens, il n'y eu pas une seul blessé civil.
Environ 15 soldats allemands furent tués et 14 français, une cinquantaine de maisons atteintes par les projectiles ; 5 ou 6 habitations furent totalement rendues inhabitables. Depuis une fenêtre du 1er étage du presbytère, je pus donner l'absolution à un soldat français qui tomba sur le pont du Breuchin : ce soldat était originaire de Val d'Ajol.
Mon poste d'observation fut mitraillé heureusement qu'en ce moment j'étais descendu au rez-de-chaussée.
Chez les artilleurs, comme le disait le rapport Contal, on déplore une pièce de 75 et la mort des servants.
Schéma sur fond de carte IGN

Schéma sur fond de carte IGN

b) Combats sur l'axe Breuches-Luxeuil

Dans le résumé du Général HOGARD il est dit :

« A 6h30, le Lieutenant FOUCRE, officier de renseignements du Bataillon ayant reçu l'ordre d'assurer la liaison avec les points d'appui avancés était parti en moto. Passé à Ormoiche sans incident, il revenait sur Breuches lorsqu'il s'aperçut que le point d'appui du pont de Breuches était attaqué ; ne pouvant rejoindre le P.C. du bataillon, il prend part au combat et est fait prisonnier (voir plus loin).

Le point d'appui de l'aspirant GARNIER a, en effet, été pris à parti vers 6h45 par deux ou trois sections ennemies débouchant des bois au Nord du village. Il résiste vigoureusement jusqu'à 9h, puis débordé et finalement encerclé, bombardé par minens, il est emporté, ayant épuisé tous ses moyens. Pertes : 3 tués et plusieurs blessés. »

En effet le Lt FOUCRE est envoyé par le capitaine BONNET, aux renseignements. Sur la moto du conducteur Larder il va au PA du Stade (Lt BARUE) calme plat. Puis on file vers le PA GARNER où cela paraît chauffer.

Arrivé avec peine chez Garnier il demande à Larcher de partir vers Ormoiche alerter le Lt LECLERE.

Le Lt FOUCRE reste un certain temps avec GARNIER.

Un récit poignant de ce combat nous est fourni par le compte-rendu de l'aspirant GARNIER lui-même :

« Vers 5 heures du matin, les premiers coups de feu se font entendre dans la direction de Si-Sauveur - ALERTE - . Chacun à son poste de combat continue d'aménager les emplacements. Vers 6h30, le lieutenant FOUCRE, officier de renseignements du bataillon, arrive avec un motocycliste. Rien à signaler. Il continue sur Ormoiche.

A 6h45, l'ennemi débouche des lisières du village de Breuches en ligne d'attaque, l'arme à la main. Attaque d'infanterie normale sans un seul engin motorisé, la direction de marche de l'ennemi étant nettement le point d'appui qui avait dû être repéré. Mes vues sont limitées à gauche par le mur du parc du château, à droite par de grands arbres et des buissons poussés de chaque côté de la rivière. Effectif ennemi : 2 à 3 sections.

A 300 mètres, j'ouvre le feu. Riposte immédiate avec balles traceuses et minen. Heureusement le tir n'est pas très ajusté. Le caporal-chef HARALD a été blessé au coude derrière le bouclier du canon de 25. Estimait que la chenillette tractant le canon n'était pas assez défilée, je la fais reculer. Le conducteur BALLEUX venant me rendre compte que sa mission était terminée est frappé d'une balle dans la tête.

Dès l'ouverture du feu, j'ai envoyé un agent de transmission du P.G. de compagnie. Je n'ai jamais revu cet agent de transmission ainsi qu'un second envoyé une heure plus tard.

Le feu s'intensifie. Le lieutenant FOUCRE au bruit des premières rafales a laissé son motocycliste continuer seul sur Ormoiche pour demander que les trois chars F T de l'aspirant BECHARD viennent me dégager. Mais nous n'avons jamais eu de nouvelles ni signe de vie d'Ormoiche. Le lieutenant FOUCRE est resté près de moi de 7h à 7h45 puis il est reparti vers le P.C. du bataillon qu'il n'a jamais rejoint puisque le P.A. était de)à encerclé.

Vers 8h, le feu de l'ennemi se fait de plus en plus nourri, plus près aussi. Je me sentais tourné de tous les côtés, cela tirait de partout. Voyant qu'il n'y avait pas de blindés et plus beaucoup d'espoir de se servir du canon de 25 j'ai fait enlever la culasse que j'ai enterrée à une vingtaine de mètres de là. Un minen tombe sur une mitrailleuse et blesse le sergent.

Nous sommes une dizaine dans cette corne de bois, nous formons le carré. Personne n'a franchi le pont tant que je tenais mon mousqueton, cela je puis l'affirmer. Mais hélas l'ennemi avait passé la rivière à gué et m'avait complètement encerclé. L'ennemi est maintenant à quelques mètres - ce sont les grenades -j'entends les commandements allemands, nous n'avons pas de grenades mais nos mousquetons font du bon travail. Dans ce chemin creux, presque à bout portant, on se sent exalté comme à la chasse au gros gibier.

Tout à coup... un très gros éclatement très près du visage.

Je ne me souviens plus... quand je reviens à moi deux allemands sont en train de me bousculer du pied, quant ils me voient vivant, mitraillettes sur le ventre et discours auxquels je ne comprends rien. Ils m'entraînent. Je veux me pencher vers deux corps pour essayer de lire les plaques, ils redoublent de brutalité et finalement m'emmènent au P.C. allemand où je retrouve le lieutenant FOUCRE qui s'était fait  « coincer » par les gens qui m'avaient encerclé. A ce moment j'ai regardé ma montre. Il était 9h.

Les allemands se trouvaient dans la propriété privée à l'abri derrière le mur en briques et balancèrent des grenades à manches sur le PA.

D'autres ennemis s'étaient infiltré par le profond lit du Breuchin et tiraient sur tout ce qui bougeait, ainsi a été tué BALLEUX dans le chemin creux. Un traquenard ce PA. Le capitaine BONNET, pas du tout renseigné, expédie au Lt LEFEVRE en soutient, trois chars commandés par l'aspirant BECHARD. Arrivés sur place, les chars s'engagent vers Breuches dégager l'aspirant GARNIER.

« Prévenu vers 8h30 que l'ennemi était au contact à Ormoiche et Breuches, le capitaine BONNET avait bien donné l'ordre aux chars FT de les dégager puis d'assurer leur repli. Mais, partis de St-Sauveur, ils arriveront trop tard ; pris à parti avant même qu'ils soient parvenus au pont de Breuches ils sont tous détruits sauf un. Le personnel réussit à s'échapper des engins, mais il est fait prisonnier par les allemands qui, après avoir débordé le point d'appui du stade, sont arrivés aux lisières de Luxeuil. »

Voilà ce que dit le Général HOGARD.

Ces chars auraient été nécessaires deux heures avant, c'est-à-dire à 7h du matin.

L'aspirant GARNIER, n'avait malheureusement pas que des héros sur son PA, n'est-ce pas sergent P*****. En plein combat quelques pleutres ont lâché leur chef et ont disparu dans la nature. Le Lt FOUCRE en a ramené deux au bout de son revolver.

Lors d'une légère accalmie, FOUCRE est parti pour rendre compte au capitaine BONNET. Il fait 200m et doit se débarrasser d'un premier ennemi. D'autres se présentent, il tire et est fait prisonnier.

Honneur à ce jeune aspirant qui a tenu ce poste impossible de 6h40 à 9h.

Malheureusement il a quitté ce bas-monde bien jeune.

Rentré de captivité le 15 juin 1945 dans un état très déficient et atteint de fièvre maligne, l'aspirant GARNIER a dû être hospitalisé trois jours après son retour, à l'hôpital Bégin.

Revenu chez ses parents à Courcelles-sous-Jouarre (Seine-et-Marne) fin août 1945, sa santé a décliné très rapidement et il est décédé, le 23 septembre 1945, à l'âge de 29 ans.

A été cité à l'ordre de la Brigade « chef de section énergique et plein d'allant. Commandant un point d'appui au pont de Breuches a, le 18 juin 1940, tenu tête pendant plus de 2 heures, à un ennemi très supérieur en nombre et en armement. A donné le plus bel exemple de courage et soutenu l'esprit de résistance de ses hommes en faisant lui-même le coup de feu avec un mousqueton, alors que son PA était complètement encerclé. A été sérieusement commotionné en fin de combat par l'explosion d'un projectile de minen à ses côtés. Sous son énergique impulsion son PA n'a succombé qu'après épuisement complet de ses moyens de défense. »

Le Lt colonel RETHORE à Froidecouche entend le bruit des combats mais n'arrive pas à se faire renseigner.

Voilà ce que dit le général HOGARD :

 « Le Lt colonel éprouve le 18 juin, le besoin d'avoir un peu plus de renseignements sur l'ennemi. Le bruit court que certains postes avancés sont pressés par des blindés. La misère de ses effectifs ne lui permet pas de lancer des grandes patrouilles, il demande un volontaire.

C'est un Officier qui se présente, le lieutenant Joseph BOUILLOC. Le Lt Colonel sourit, car il connaît bien ce jeune St-Cyrien. En avril, commandant en second un corps franc, BOUILLOC a fait preuve, au cours d'un reconnaissance, du plus grand sang-froid en ramenant dans nos lignes son Chef blessé à ses côtés, malgré le tir ennemi, et les difficultés du parcours, miné en plusieurs endroits, (il s'agit du Lieutenant BECK, futur général de brigade).

En mai, devenu Chef du Groupe-franc, il a dirigé très en avant de notre sous-secteur de Hoffen, une opération de nuit qui a permis de découvrir, sur un large front, les emplacements occupés par les allemands. En ce tragique mois de juin, après dissolution du Corps-franc, il a donné à l'Etat-Major du Régiment l'exemple d'un activité inlassable comme Officier de liaison.

Le colonel ne peut pas refuser un tel volontaire. BOUILLOC saute sur une moto, enfonce son béret vert au niveau des yeux et se lance en avant. »

II a toujours aimé la vitesse, demandant quelques mois plus tôt à servir comme observateur en avion.

« A cette allure, ils ne m'auront pas », se dit-il, ce qu'il ignore, c'est que les allemands se sont infiltrés partout, entre les points d'appui du 79ème. Au pont de Breuches, qu'il est obligé d'emprunter, un bouchon solide est déjà installé, avec une mitrailleuse. L'ennemi, tapi, laisse approcher le véhicule, et tout près, fusille son conducteur sur le guidon.

Ils sont tellement nombreux à tirer à la fois que la moto s'embrase dans la seconde, réduisant BOUILLOC en cendres.

Avec un véritable engin il aurait peut-être réussi son pari, mais le matériel à sa disposition est loin de lui permettre de mettre toutes les chances de son côté. BOUILLOC est enterré le soir même par le maire de Breuches, M. JEANGCY.

Et cela s'embrase aussi du côté du stade de Luxeuil.

Ici le compte-rendu du Général HOGARD :

« A partir de l Oh, l'ennemi a pris le contact du point d'appui du stade, commandé par l'Aspirant BARUE. Ses patrouilles motorisées ont été repoussées lorsqu'elles sont arrivées à 200m des barricades de troncs d'arbres abattus sur la route de Breuches, mais la défense est assez vite débordées par de l'Infanterie qui progresse par la vallée du Breuchin, les lisières des bois au nord et atteint finalement les lisières de Luxeuil. Le point d'appui se trouve vers 11h coupé de l'arrière. Vers 13h, il est bombardé par du 105 et l'infanterie ennemie s'infiltre. L'adjudant ROZAUX est grièvement blessé. A 16h environ, ayant épuisé ses moyens de défense, le point d'appui cesse toute résistance. Il y a 5 tués et 3 blessés.

Au point d'appui d'Ormoiche (S/Lieutenant LECLERE), on n'avait pas été attaqué. Le chef du point d'appui suivant au bruit des combats la progression ennemie vers St-Sauveur et Luxeuil. Lorsqu'il se rendit compte que la fusillade s'était déplacée loin vers l'est et qu'il était coupé du reste du bataillon, il attendit la nuit et après avoir détruit tout ce qui ne pouvait être emporté, chercha à rejoindre le bataillon. Il fut capturé avec son détachement, le 24 juin.

Et le capitaine BONNET est encore toujours privé de renseignements précis sur la situation. Des bribes des combats qui se déroulent lui parviennent et se contredisent parfois. Il envoie donc le Lt LAMOUREUX aux renseignements et donne ordre au Lt MICHALET de soutenir ce qui peut encore l'être avec ses R35.

Le Lt LAMOUREUX, sur la moto d'un conducteur du 29e B.C.G., arrive à toucher FIX qui enfin peut lui donner pas mal de renseignements. Il veut s'en retourner au PC BONNET mais la route est déjà coupée. Une rafale, le conducteur est blessé et LAMOUREUX est fait prisonnier.

Le PA du Stade; sous liaison continue à se battre. Ses feux gênent la progression de l'ennemi. Celui-ci met le paquet.

Décimé, plus de munitions, le PA se rend.

Le PA d'Ormoiche est ignoré par les allemands circulant à quelques centaines de mètres ; à 17h le Lt LECLERE et ses hommes replient et se perdent dans la nature jusqu'au 24 juin où ils sont capturés (voir rapport HOGARD).

Le PA DURANT a été surpris par derrière. Quelques hommes et DURAND lui-même ont pu s'échapper et rallient le bataillon sans avoir tiré un seul coup de fusil.

Juin 1940. Des combats à front renversé près de Luxeuil (3/)

c) Le repli

Et voilà la suite des opérations. Le général HOGARD nous dira :
« C'est vers 11 h que le commandant du Bataillon avait reçu l'ordre de repli en direction de Faucogney. Le colonel commandant le régiment était alors à Raddon.
Les agents de liaison envoyés à St-Sauveur et au stade pour transmettre l'ordre ne reviendront pas et l'on n'a rien trouvé qui permette de savoir s'ils sont arrivés à destination et ont pu remplir leur mission. Il semble que les éléments de St-Sauveur aient été avisés de l'ordre de repli par les artilleurs.
Vers l lhl5 - l lh30, le S/Lt NEYCIENS a été envoyé porter l'ordre au point d'appui du Lt DURAND (N. de Luxeuil). Il exécute sa mission accompagné par un S/Officier et, en rentrant, rend compte que l'ennemi tient les lisières N. de Luxeuil. Le Lieutenant DURAND l'accompagne : il rend compte de son côté qu'au moment où il commençait le repli prescrit, il avait été surpris par les allemands et n'avait pu que s'échapper avec quelques hommes.
Vers 13h30, le PC du Bataillon quitte Luxeuil où l'ennemi est entré. Il arrive à Raddon vers 16h. Le colonel prescrit de défendre quelque temps cette localité où il n'y a que des forestiers.
Des postes sont installés aux abords des routes, dans les bois. Deux canons de 25 surveillent la route de Luxeuil. »
Et devinez quel groupe de canons de 25 y seront employés ? Celui du Sergent HALBWACHS qui a tellement manqué au PA du Lt DURAND. Où était-il, d'où sortait-il ? Ordres mal donnés, ordre mal compris. Le principal est qu'il est là au bon moment.
Un canon est installé en embuscade à l'avant du Raddon direction Luxeuil. Un beau champs de tir mais le massif forestier à droite est propice à l'infiltration ennemie.
Un deuxième canon de 25 à l'entrée de Raddon.
Vers 17h30, un détachement blindé allemand venu par la route de St-Sauveur - Breuchotte, ouvre le feu sur le village. Peu de temps après, on tire sur des motocyclistes arrivant par la route de Luxeuil. Des chars atteignent la lisière Nord de Breuchotte. On distingue une quinzaine d'engins.
Le tir s'intensifie. Le Cdt BONNET réussit a téléphoner au PC du colonel, par réseau civil, qu'il est accroché à Raddon par des blindés. Le colonel RETHORE autorise alors un nouveau bond vers l'arrière, jusqu'à Faucogney. Il s'effectuera vers 18h30 - 19h en utilisant les vergers et l'abri des maisons?.
Ordre de décrocher est donné à tous les éléments. Dans la précipitation HALBWACHS oublie son canon de 25 situé en avant de Raddon qui après une belle défense s'est fait avoir. Inutile de vous dire que le caporal n'a pas encore digéré cela. Il habite à Strasbourg.
Le deuxième 25 est rendu inutilisable et laissé sur place. Les serveurs se joignent au groupe commandé par l'adjudant GARNIER.
Les canons et l'infanterie se replient vers Faucogney. Le capitaine BONNET est même affolé par cette...fuite. Il demande de l'aide au Lt Colonel RETHORE. Trois chars R35 lui sont envoyé pour le dégager. Ils n'ont plus trouvé que le central téléphonique de Raddon détruit. Le capitaine BONNET, par des chemins impossibles rejoint directement le Mont de Fourche.
Les allemands ne poursuivent pas. Ils ne sont plus intéressés. Quelques patrouilles légères motorisées tâtent le terrain.
Le Lt NEYCHEN reste en arrière pour récupérer quelques éventuels groupuscules venant de Luxeuil. Il ne rejoint plus.
Les artilleurs du 69e RAMF rejoignent aussi les chars du Lt MICHALET, de même le 8/26e RA hippo.
Par contre le III/69e avec du 155 va continuer vers le Mont de Fourche.
d) Combat de Faucogney
Ce village est séparé de Raddon par 7 km de route traversant les hameaux de Amage et Ste-Marie-en-Chanois.
Le capitaine BONNET n'étant pas présent, le Lt colonel RETHORE nomme le Lt LABAY patron des éléments du 79e RI présent à Faucogney en tout une cinquantaine.
Voila ce qu'en dit le Général HOGARD.
« Le repli sur Faucogney a été couvert par les quelques chars encore utilisables. Dès l'arrivée on organise un « bouchon » avec les deux groupes du 69ème RA, les chars R35, un petit détachement cycliste du dépôt 204 aux ordres du Lieutenant DUPONT et les faibles éléments rescapés du bataillon BONNET, commandés alors par le Lieutenant LALOY.
La destruction du pont sur le Breuchin est préparée. Quelques chars R35 sont mis en place au sud de la localité pour interdire la vallée de ce cours d'eau que l'infanterie squelettique ne peut surveiller.
Vers 21h on fait sauter le pont sur le Breuchin après le retour de la patrouille de 3 chars R35 envoyée vers Raddon.
Au cours de la nuit, l'ennemi resserre le contact. On l'entend travailler à la réparation du pont détruit. Des tirs de mortier sont effectués pour empêcher cette tentative. En fin de journée, le P.C. du colonel RETHORE est transféré à la Poste de la Longine. »
L'incontournable Lt CONTAL nous rapporte dans son compte-rendu :
« Vers 16h, malgré quelques obus, nous arrivons à l'entrée de Faucogney. Nous n'avons plus de nouvelles du capitaine BONNET commandant le bataillon ni du lieutenant LAMOUREUX commandant le 3e CEF
Le commandant JODEAU nous fixe immédiatement notre nouvelle mission : interdire les routes venant de Luxeuil et de Mélisey qui convergent sur Faucogney. Je ne place qu'un groupe au sud du village, dans une partie boisée dominant la vallée étroite, n'ayant plus assez de munitions pour en faire intervenir efficacement deux. Le deuxième groupe devient groupe de voltigeurs.
Nous n'avons rien mangé depuis la veille. Le commandant nous fait donner du pain et du bœuf en conserve. J'établis un tour de guet et nous nous couchons dans le bois.
Rien ne se passe jusqu'au lendemain 19.
Si, une patrouille de trois chars commandés par l'aspirant LABBAYE en avant du village.
Puis tous les chars se mettent en sentinelles avancées sur les lisières ouest du village.
Les sapeurs font sauter le pont sur le Breuchin.
Une patrouille allemande au sud-ouest de Faucogney. On tiraille ; balles traçantes contre riposte de mitrailleuses, un tir des chars de l'aspirant LABBAYE.
Vers 22 h, des allemands essayent de jeter une passerelle sur le Breuchin.
Les artilleurs tirent sur les bois ; y mettent le feu.
Le Lt CONTAL sur sa petite colline rocheuse à l'entrée de Faucogney en venant de Mélisey s'endort à côté de son mortier de 81.
Et commence la journée du 19 juin.
  « La nuit a été très douée. J'ai dormi au pied d'un arbre, sans faire de mauvais rêve. Vers 8h, le lieutenant LALOY, qui avait pris le commandement du bataillon en l'absence du capitaine BONNET, me fait transmettre l'ordre de tirer sur un pont détruit la veille, sur le Breuchin. Les allemands avaient établi une passerelle durant la nuit. J'exécute l'ordre mais ne puis vérifier le résultat.
Vers 13 h 30, sur la route de Mélisey, un side-car allemand apparaît. Un char français placé à la corne du bois s'avance. Les deux allemands abandonnent le véhicule et gagnent la forêt à toutes jambes. L'engin est détruit. »
Nous avons grimpé la colline occupée par CONTAL dont vous venez de lire le rapport. Nous avons arpenté la petite route vers Mélisey, se faufilant entre de belles collines boisées. Nous avons admiré un très beau calvaire et nous avons aussi pensé à ces quelques fantassins du 79e qui en scrutant cette petite route se demandaient à quelle sauce ils allaient être mangés.
Il fait beau ce 19 juin, il fait chaud. Et ça tire et ça tiraille. Même le mortier du Lt CONTAL se met de la partie. Il raconte :
« Un peu après, l'artillerie ennemie bombarde tous les buissons entre les deux routes ainsi que les premières maisons du village. Notre artillerie riposte.
Vers 15h30, GUERINGER qui a grimpé dans un arbre, repère un canon antichar allemand en bordure de la route de Luxeuil. Un tir de mortier immédiatement exécuté le fait taire, mais je ne puis affirmer sa destruction car il était à la lisière de la forêt. C'est alors que l'ennemi arrose à la mitrailleuse le versant où nous sommes. Nous nous abritons derrière les arbres. Personne n'est touché, le tir étant imprécis car nous n'avons pas été exactement repérés.
J'interviens encore, prenant comme objectif un boqueteau, à 500 mètres au sud-ouest de Faucogney où l'infanterie ennemie était parvenue.
Vers 16h, l'ordre de repli est donné. Nous chargeons le matériel et partons sur des camions.
L'ennemi tire sur la route que nous empruntons. Un obus explose à trente mètre de nous, pas de dégâts. »
Entre-temps est arrivé sur la table du Lt Colonel RETHORE l'ordre d'opération pondu vers 3h du matin signé par le patron, le Colonel DULUC. Il demande de replier le sous-groupement, si la pression sur Faucogney se faisait trop forte, sur le col du Mont-de-Fourche et de s'y défendre sans esprit de recul. En un mot, c'est la fin pour cette poignée d'hommes.
Donnons la parole au général HOGARD.
Le 19 juin, Faucogney, pressé tient jusque 15h avec les éléments arrivés la veille. L'artillerie ennemie harcèle la localité.
Lorsque celle-ci est menacée d'encerclement, l'ordre d'évacuer est donné. Là, plus encore qu'à Luxeuil, le décrochage sous les tirs de l'artillerie et des chars ennemis est difficile. On utilise des camions pour le faciliter.
Mais le temps gagné a permis d'organiser une nouvelle position d'arrêt de part et d'autre du Col de Fourches avec destruction préparée immédiatement à l'ouest du Col pour couper la route venant de Faucogney. La liaison est prise avec le 168e R.I.F. qui est installé depuis le col jusqu'au fort de Rupt. De là, on aperçoit bientôt une important colonne motorisée allemande au nord de Martenot.
Devant cette menace, la destruction préparée est mise en oeuvre, pendant que le 168e prend l'ennemi sous son feu. La route est effondrée sur 3 à 4 virages.
Puis on regroupe les restes du détachement sur la rive Est de la Moselle ; quelques éléments de la  C.E.F.,  de  la  section  du  commandement,  des  Transmissions,  quelques  secrétaires  et motocyclistes.
L'ennemi, arrêté par la destruction, a eu plusieurs de ses chars détruits et n'a pas insisté. »
Le Lieutenant CONTAL que nous avons pu interroger, nous parle de cette arrivée du Col du Mont-de-Fourche. Ces 12 km sont vite avalés en camion. Il regroupe tout son petit monde et son mortier autour de lui en face du Restaurant du Col et il va se présenter au Lieutenant Colonel RETHORE accompagné du Capitaine BAUTRY. Cette mission accomplie, il va rejoindre ses hommes quand, d'un petit groupe d'officiers de l'E.M., un de ces « Messieurs » se tournant vers son entourage claironne bien haut :
« Tiens voilà un officier qui a oublié qu'il faut aussi se laver de temps en temps ».
Et le Lt CONTAL crevé, fatigué, vidé, se regarde et se dit :
«Et il a même raison, le bougre !! »
En effet depuis le 14 juin, il n'a guère pu soigner son « look», il ne s'est ni déshabillé, ni changé ; à peine assis il s'endormait.
Et lui, le dandy, où était-il durant ces trois derniers jours pour juger ainsi les autres ?
De ce détachement débarqué il y a trois jours à Conflans, il reste la section CONTAL, quelques éléments des PA éclatés, quelques éléments de l'E.M. -60 à 80 hommes.
CONTAL a la parole :
« Le capitaine BONNET arrive enfin. Je reste avec mes hommes, assis derrière une petite maison, enlace du café. Nous restons là environ une heure, attendant les ordres. Tout à coup, des rafales d'armes automatiques se font entendre. Le colonel me donne l'ordre de me diriger vers Le Chêne. Mes hommes grimpent sur un camion, certains sur les marchepieds. Je descends à pied, en compagnie du sous-lieutenant BICKAR. Sur le pont de la Moselle à Rupt, nous retrouvons le capitaine BONNET armé d'un mousqueton. Il garde BICKAR et me dit de continuer vers Ferdrupt. Arrivé où étaient le colonel avec un général, je ne trouve plus mes hommes, le camion avant dû se tromper de route. A l'écart, je vois FIX. Je lui demande ce qu'on doit faire. Il me répond : c'est fini, le colonel a dit de prendre le maquis. Il paraît qu'une armée se reforme vers Gérardmer ».
« Que fais-tu ? » lui demandai-je.
« Je reste avec le colonel. » me dit-il.
« Alors, vous allez vous laisser prendre ici ? »
II hausse les épaules, désespéré. Je lui serre la main et lui dit à peine au revoir, ne voulant pas lui laisser voir que je pleurais. »
Nous avons vers avril 1945 rencontré le Lt FIX à son P.C. à Niederroedern dans l'outre-forêt.
Il commandait une compagnie du 158e RI et était sur le point de faire mouvement. Chacun est reparti vers là ou le devoir l'appelait.
Le rapport du Général HOGARD nous parle.
Recueilli sur la crête Ouest de la Moselle par des éléments du 168e R.I.F., le détachement se maintiendra encore sur la rive gauche et à Rupt-sur-Moselle, le 20 juin jusqu'à 15 h.
A ce moment, Le Thillot et Ramonchamp au sud, Remiremont au Nord, sont tombés.
Un dernier bond est alors ordonné jusqu'à la crête boisée comprise entre la Moselle et la Moselotte. Il est rendu possible par une vigoureuse action du 69e RA qui surprend à moins de 2000m une masse de 60 à 70 chars ennemis dévalant les pentes Est du fort de Rupt, en direction de la rivière. Il achève, sur cet objectif de choix, de vider ses coffres.
Il est alors décidé de se replier sur Saulx puis sur le Col du Rahmné (au N.E. de Saulx dans la forêt de Longegoutte) où l'on se regroupe en fin de journée. Les Etats-Majors du 79e R.I.F. et du 69e R.A. s'installent au Col. Les restes du Bataillon BONNET (4 officiers, 50 hommes environ, 3 canons de 25) s'établissent entre Saulx et le Col.
Le vendredi 21, ces restes sont encerclés. Toutes les vallées autour de la forêt de Longegoutte sont occupées par les Allemands qui, cependant, ne tentent pas de pénétrer dans le massif. On peut voir, sur les arrières, l'ennemi sillonner la vallée de la Moselotte et circuler dans Saulxures. Tout bruit de combat cesse.
Ces un coin perdu où ce valeureux groupement s'est retiré. Le col de la Rahmné se trouve à 865m. Un sentier du Club Vosgien vous y mène depuis « La Toreille, dernière ferme où se perd le chemin forestier. Les quelques éléments du Bataillon BONNET se sont logés tout au long de ce chemin dans les fermes. Nous en avons compté une vingtaine.
Ce furent des journées de grandes tristesse. Les vivres se raréfient. Les hommes se partagent des boules de pain moisi. Les artilleurs abattent leur dernier cheval.
Le 22, on apprend par une émission de radio, la signature de l'Armistice qui doit entrer en vigueur 6 heures après l'armistice avec l'Italie.
« Puis le 25, on connaît la signature de l'Armistice avec l'Italie.
Le Colonel RETHORE se rend à Saulx pour entrer en contact avec le Commandement allemand. Vers midi, ordre est donné de descendre dans la vallée. En tant que troupe encerclée, le détachement est considéré comme prisonnier de guerre. »
Les éléments retournent à Saulx où la population, au dire du Lt FIX, leur propose de grosses tartines de pain frais et de confitures de fraise. Un de ses meilleurs souvenirs, nous dira-t-il.
Le détachement est dirigé sur Colmar et enfermé dans l'usine Kiener. De là il est dirigé sur Neuf-Brisach.
C'est par petits groupes qu'ils iront vers leur destin : Stalag, Oflag et pour longtemps, s'ils en reviennent.
Les Alsaciens et les Mosellans sont démobilisés puis récupérés par les occupants à court de soldats.  Les « Malgré-Nous » se trouvent en Russie. Un tiers n'en revient pas, d'autres reviennent invalides à vie.
« C'est la fin... Mais une fin qui n'est pas sans grandeur. Les munitions étaient à bout ; seul l'armement léger avait pu suivre ; aucun ravitaillement en vivres n'avait été perçu depuis le départ d'Alsace. Le détachement s'était remarquablement battu, causant de lourdes pertes à l'ennemi, en chars et en hommes.
Une pluie pénétrante se mit à tomber. Le « Baroud d'Honneur », car tous ces combats acharnés n'étaient guère que cela, était terminé.
Plus tard, un article du « Militär Wochenblatt, du 8 Novembre 1940, devait évoquer ces combats de Luxeuil - St-Sauveur en parlant » du monstrueux enfer de Luxeuil qui laisse loin derrière lui les jours de Cambrai - Cassel et de l'Argonne ».
Voici la fin du Rapport du Général HOGARD en ce qui concerne ce détachement. 
Nous aimerions lire le mot «fin» au bas de ce récit mais voilà que réapparaît notre cher Lt CONTAL, notre infatigable guerrier.
On parle du regroupement d'une force armée du côté de Gérardmer.
« Allons voir, ils auront peut-être besoin de nous » et il raconte :
« Je me dirige vers un pain de sucre qui domine Ferdrupt, au nord de ce village, voulant gagner Gérardmer. Ce pain de sucre est en réalité le « Haut de Bélué, une arête de 870m de haut orientée SO-NE.
Sur la pente, je rencontre un groupe de soldats parmi lesquels se trouvaient DOMPTAIL, l'ordonnance du capitaine BONNET et GEHIN André. Aucun officier n'est avec eux. Ils ne savent que faire, disant qu'ils doivent aller dans la montagne. Je leur dis de ne pas se rendre et de venir avec moi. Nous montons et couchons sous les sapins en haut du pain de sucre. Nous trouvons des tracts lancés d'avion. « Armée d'Alsace », ne renouvelez pas le désastre de Dunkerque. Soldats, vous êtes encerclés. Cessez la lutte, vous regagnerez rapidement vos foyers. »
Ce 19 juin était certainement le jour le plus long pour lui et ses compagnons.
Et il continue
Le 20 juin.
  Au matin, nous partons à travers la montagne, guidés par GEHIN André, bûcheron de Cornimont. En route, nous avons la chance de trouver des boîtes de conserve, des fuyards s'en étant délestés sans doute. Le même jour, nous arrivons à un petit hangar, en plein forêt, au sud de Travexin. GEHIN va en reconnaissance dans une petite ferme habitée par sa sœur. Quand il revient, il nous annonce que Gérardmer est occupée. Je décide donc de rester provisoirement à cet endroit. Nous avons du foin pour dormir, de l'eau d'un clair ruisseau et des conserves pour quelques jours.
Le 25 juin.
  La nourriture commence à faire défaut. GEHIN allait au ravitaillement, mais dans ce coin si pauvre, il ne peut y suffire. Je prends la décision de nous diviser par groupes de 2 ou 3, pour rejoindre des Français qui, croyons-nous, poursuivaient la lutte. Nous n'avions aucune connaissance de l'armistice, la sœur de GEHIN n'ayant pas de poste de T.S.F.. Au soir de cette journée, nous ne sommes plus que trois sur 26 (GEHIN, DOMPTAIL et moi). J'ai décidé de partir le 26 au matin vers le nord. GEHIN m'a apporté une carte de calendrier du département des Vosges.
Avant de nous séparer un dernier repas chaud. Pour ces 26, il y aura 13 pommes de terre, maigre n'est-ce pas ?
Le 26 juin.
Avec l'aide de sa sœur, GÉHIN va chez lui à Cornimont. DOMPTAIL reste avec moi. Nous partons dans la montagne, à travers bois. Une grosse pluie survient. Heureusement, de la fumée sort de la cheminée d'un petit refuge. Nous observons. Ce sont des Français, six soldats du 20e train, qui l'occupent. Ils nous apprennent que la radio avait annoncé l'armistice. L'un d'eux, habillé en civil, allait travailler dans une ferme et avait rapporté la nouvelle. Grande fut ma peine. Nous nous déshabillons complètement pour sécher nos vêtements trempés. Les six soldats voulaient rester là un moment. Je leur recommande de ne pas se rendre car la guerre n'est pas finie. Je décide alors de regagner Nancy pour avoir des nouvelles de ma famille et d'emmener DOMPTAIL chez lui à Roville aux Chênes, près de Rambervillers, en passant.
En 1997, nous avons voulu rendre visite à GEHIN. Il est décédé en 1996 à l'Hospice de Cornimont. Nous le connaissions bien, on se téléphonait une fois par an.
Ils étaient 350 environs à débarquer dans cette minuscule gare ce 16 juin dans l'après-midi, des frontaliers du 79e R.I.F.
Le 19 juin en fin d'après-midi il en reste à peine 20%. Les autres morts, prisonniers, blessés, perdus dans la nature après de durs combats.
Les uns furent des hommes courageux, des héros. D'autre, moins courageux, ne le furent pas.
Ce petit reste fût fait prisonnier pour cinq longues années.
Trois, à notre connaissance, ont pris le maquis, cherché à continuer la lutte. L'armistice étant signé, ils sont arrivés à rejoindre leurs familles.
Nous croyons que ce petit récit serait une saine lecture pour les nombreux détracteurs des combattants de 1940. Ils étaient partout en France, ces hommes qui se battaient, résistaient. L'ennemi a souffert. Il s'en souvient, il en parle encore avec admiration de ces hommes qui n'ont pas voulu se laisser faire. 
Juin 1940. Des combats à front renversé près de Luxeuil (3/)
Vingt cinq ans ont passé.
Un promeneur solitaire, perdu dans ses souvenirs se dirige de Luxeuil vers Breuches. C'est le Colonel BONNET qui revient pour se souvenir de l'Aspirant GARNIER, pour honorer la mémoire des soldats du 7/9 morts en ces lieux.
17 juin 1940 - 12 juillet 1965.
Que tout cela est loin et pourtant reste si près. Il nous raconte sa visite :
« Je n'avais pas revu ce-secteur depuis le 17 juin 1940, veille des combats, où j'avais accompagné le Lt Colonel RETHORE pour passer l'inspection des dispositions prises dans la journée en exécution des ordres reçus pour assurer la défense de Luxeuil.
J'ai donc fait le déplacement à pied sur la R.D. 6 de Luxeuil à Breuches, en passant par l'ancien emplacement du P.A. du Stade, impossible à situer maintenant par quelqu'un qui n'a pas participé aux combats, car la topographie des lieux a été complètement bouleversée : la partie sud-est de la forêt domanial des Sept-Chevaux qui borde la route du Nord et dans laquelle les éléments du 79e R.I.F. avaient passé la nuit du 16 au 17 juin 1940, a fait place sur une longueur de près de 2 kilomètres à l'Ouest de Luxeuil, à une zone de belles habitations modernes (villas et H.L.M.) harmonieusement réparties dans de vertes étendues de gazon, sillonnées d'allées et parsemées de massifs de fleurs. Elle se prolonge à l'ouest et toujours au nord et le long de la route par un magnifique lac artificiel sur les berges duquel sont amarrés de nombreux canots multicolores. Un grand hôtel a été construit en arrière, de vastes zones de camping et de parking ont été aménagées aux alentours et des équipes des Ponts-et-Chaussées étaient en train de rectifier et d'élargir le tracé de la route, sensiblement à l'emplacement du tournant où nous avions établi en 1940 une barricade d'arbres abattus pour assurer la protection du P.A. du Stade contre les incursion d'engins motorisés ou blindés ennemis.
Dès mon arrivée au pont de Breuches, j'ai marqué instinctivement un temps d'arrêt car mes regards se sont portés sur l'ancien emplacement du P.A. de l'aspirant GARNIER pour en mieux revoir tous les détails.
Pratiquement peu de changements dans le panorama depuis 1940 à l'exception d'une belle statue, toute blanche de la Vierge, « N.-D. de la Paix » qui est devenu par la volonté de Dieu et des habitants du pays le centre de l'ex-emplacement de combat.
Je me suis rendu au cimetière situé au Nord du pont et immédiatement à l'Ouest de l'ex P.A., j'ai trouvé sans difficulté à la corne N.-E. et contre le mur d'enceinte la tombe où avaient été inhumés le lieutenant BOUILLOC, les soldats BAILLEUX et HAUBER. Cette tombe est maintenant vide car les corps de nos camarades on été relevés, mais elle continue d'être entretenue. Elle est du reste facile à identifier par les inscriptions et les noms gravés sur des plaques de marbre blanc scellées dans le mur et les bouquets de fleurs artificielles qui y sont déposés, pieux témoins de la reconnaissance et du souvenir de la commune.
Sur la plaque centrale, en dessous d'une croix et de 2 branches de lauriers entrelacées est portée la mention :
  HOMMAGE DE
RECONNAISSANCE
  BAILLEUX René
BOUILLOC Joseph
HAUBER Eugène
TOMBES GLORIEUSEMENT SUR NOTRE SOL
LE 18 JUIN 1940
BREUCHES -ORMOICHE

Contribution photo: Isabelle RATHIER 23/11/2017
Cette photographie est sous licence d'usage
CC BY-NC-SA 2.0

https://www.memorialgenweb.org/

Seul, dans le calme de ce petit cimetière de campagne, je me suis longuement recueilli au pied de cette tombe et devant cette plaque.
A cet instant je me suis souvenu des vers du beau poème : « A mes Hommes qui sont morts », de mon grand Ancien de la Légion Etrangère, le capitaine de BORELLI, car moi aussi... j'étais leur ancien capitaine... qui se souvenait d'eux et... qui pleurait ses Morts.
En quittant le cimetière, je me suis rendu sur l'emplacement du P. A. où comme je l'ai déjà signalé s'élève la belle statue de pierre de N.-D. de la Paix, située sur le talus qui surplombe la route de 2 à 3 mètres en cet endroit boisé et exactement sur l'emplacement de la mitrailleuse de droite du P.A. On y accède par un bel escalier de pierre de 6 marches.
  Sur le socle de la statue sont fixées 2 plaques de marbre blanc.
  L'une de face porte l'inscription :
RECONNAISSANCE
DE LA PAROISSE
A
N.-D. DE LA PAIX
INAUGURATION - BENEDICTION
PAR SON EXC. MGR DUBOURG
ARCHEVEQUE DE BESANCON
13 SEPT. 1953
l'autre, sur le côté droit, mentionne les noms de nos 3 camarades tombés sur le territoire de la commune. A la partie supérieure le médaillon mortuaire du soldat BAILLEUX dont j'ai reconnu de suite la bonne figure sympathique d'un des meilleurs soldats de ma compagnie du temps de paix.
A proximité du monument et simplement séparé par un chemin encaissé dans lequel BAILLEUX fut tué d'une balle dans la tête, s'élève une petite maison dont la propriétaire, qui en 1940 habitait le centre du village, m'a donné de nombreux détails sur la défense héroïque offerte par la garnison du P.A. et tels qu'ils sont gravés depuis 25 ans dans la mémoire des habitants.
Sur place elle m'a montré les emplacements où ont été ramassés les morts et l'endroit au tournant de la route et tout près du P. A. où gisait le corps calciné sur sa moto du lieutenant BOUILLOC, tué presque à bout portant par une rafale d'arme automatique.
Je me suis présenté au curé du village. Monsieur l'abbé MARTIN, qui m'a reçu avec la plus grande amabilité. Il a succédé, depuis 1950, au prêtre qui était en 1940 à la tête de la paroisse, et a pris une part active à l'érection du monument de la Vierge de la Paix dont il m'a remis une belle carte postale. Il m'a dit qu'au cours des fouilles effectuées pour l'établissement des fondations de la statue on avait trouvé, enfouies dans le sol, de très nombreuses douilles de cartouches et d'obus de canon de 25, ces munitions que les défenseurs ont utilisées jusqu'à leur épuisement complet.
Apprenant par mes soins l'existence du Clocheton, il m'a exprimé ses regrets, parce qu'il l'ignorait à la date du  13 septembre  1953, de n'avoir pu prévenir notre président de l'inauguration et de la bénédiction du monument.
Nous nous sommes promis de rester en liaison et il a bien voulu célébrer une messe à la mémoire de nos morts du 79e. Il m'en a fixé la date au dimanche 25 juillet 1965 à 10h30 et fera les commentaires circonstanciés sur les vertus de patriotisme et de culte du souvenir au cours de la cérémonie.
Pour terminer j'ai rendu visite au maire de Breuches, Monsieur PARISOT, qui a succédé au maire de 1940, lui-même étant mobilisé à l'époque comme sous-officier d'artillerie. Accueil très cordial de sa part et de son épouse. C'est par eux que j'ai appris que la commune continuait à entretenir l'emplacement où nos camarades avaient été inhumés, bien que leurs corps aient été relevés à la demande des familles.
En remerciement j'ai remis à Monsieur le Maire un exemplaire de l'Historique du 79e RIF pour être conservé dans les archives de la commune avec la dédicace suivante :
« Remis à Monsieur le maire de BREUCHES l'historique du 79e RIF en souvenir des combats du Pont de BREUCHES, du PA. du Stade de LUXEUIL et de SAINT-SAUVEUR, en date du 18 juin 1940, en l'honneur des soldats qui ont fait glorieusement le sacrifice de leur vie en particulier de ceux dont la mémoire est pieusement entretenue par les habitants du village de BREUCHES. »
Mon pèlerinage terminé, j'ai rejoint Luxeuil au début de l'après-midi très ému par tous les sentiments ressenties les souvenirs revécus à 25 ans de distance dans cette région, mais aussi particulièrement réconforté par le bon accueil qui m'avait été réservé et la vivacité du culte du souvenir de nos concitoyens.
Maintenant la paix et la joie de vivre ont effacé toutes les traces de combats et de mort dans la région de Breuches.
Il ne reste plus pour le pèlerin averti et attentif que quelques signes et témoignages discrets, dissimulés presque jalousement par la nature toujours renaissante.
Il reste surtout une belle statue de Notre-Dame de la Paix et le souvenir toujours vivant dans le cœur des anciens combattants, des camarades qui sont tombés au Champ d'honneur.
Et c'est très bien ainsi.
En ce mois de février 1997 nous avons, avec émotion, retrouvé le PA GARNIER et la belle statue blanche de la Vierge. Nous nous sommes recueillis. Au cimetière contre le mur N-E est fixée la plaque souvenir dont a parlé le Colonel BONNET.
Quelques fleurs artificielles sont encore toujours déposées devant cette plaque. On se souvient encore d'eux et c'est bien.
Nous revenons à Juin 1940. Que cela a dû être dur, pour le Lt Colonel RETHORE, de voir ce 79e RIF, qu'il a recrée en 1938, se dissoudre ainsi.
Oui était ce soldat ? Ce Chef?
Né le 30 octobre 1890 en Chaumont-en-Vexin (Oise) engagé volontaire le 10 octobre 1911, comme élève admis à l'Ecole Spéciale Militaire de Saint-Cyr au titre du 10e BCP, aspirant le 10 octobre 1912, il est promu s/Lieutenant le 1er janvier 1914 et affecté au 28e Régiment d'Infanterie.
C'est dans les rangs de ce Régiment qu'il part en campagne en août 1914. Il est grièvement blessé dans la nuit du 3 au 4 novembre 1914, à Sapigneul, par balle de fusil occasionnant une plaie au thorax avec fracture de l'omoplate et perforation du poumon.
A peine remis de cette grave blessure, il rejoint son unité.
Promu Capitaine le 4 avril 1916 au 120e RI il terminera la guerre à l'Etat-Major de la 71e Division d'Infanterie, après avoir obtenu deux citations :
- à l'ordre de la Brigade, du 02.02.1918 :
« Officier distingué. Très grièvement blessé devant Reims en 1914, à la tête de. sa section. Revenu au front après une longue convalescence et encore insuffisamment rétabli, il n’en a pas moins continué à assurer en tout temps le commandement de la Compagnie depuis dix-huit mois, de façon remarquable. »
- à l'ordre de la 71e D.l. du 16.03.1919 :
« Officier d'Etat-Major de première valeur. Chargé le 2 novembre 1918 en Argonne, d'assurer sur le terrain la coordination des attaques de deux régiments, s'est acquitté de cette mission avec beaucoup d'audace et un remarquable sens de la situation et a contribué ainsi, pour une bonne part, au succès de l'opération. S'était fait remarquer auparavant comme Commandant de Compagnie, poste dans lequel il a été grièvement blessé. »
II  est  ensuite  affecté,  le  15.03.1919  à  l'Etat-Major  de  la  3e  Division  Polonaise,  puis  à  la Mission Française en Pologne.
Rentré en France, il reçoit le 07.12.1920, son affectation au Ministère de la Guerre (Secrétariat Général).
Promu Chef de Bataillon, le 25.12.1928, il prend le 01.10.1931, le commandement d'un bataillon du 21e Régiment d'Infanterie.
Son temps de commandement accompli, il rejoint le 07.03.1934 l'Etat-Major du Général Gouverneur Militaire de Paris, où il reste jusqu'en juin 1937, date à laquelle il est nommé Lieutenant Colonel au 23e Régiment d'Infanterie de Forteresse.
Enfin, à la Mobilisation, il prend le commandement du 79e RIF.Il parvient très vite à faire de ce jeune Régiment une splendide unité, parfaitement homogène et cohérente. Plusieurs grands Chefs se sont plu à la reconnaître, à la suite de leurs inspections.
Ses brillantes qualités allaient être à nouveau mises à l'épreuve dans les circonstances difficiles relatées dans le présent Historique.
Prisonnier, il passe cinq années en Allemagne. Il avait été promu Colonel le 25 mars 1941 et cité à l'ordre de l'Armée n° 143816 en date du 25.05.1943 :
« Débarqué de chemin de fer et affecté en pleine bataille, le 16 juin 1940, avec de faibles éléments de son régiment, à un groupement combattant à l'ouest des Vosges a pris sous ses ordres  diverses fractions d'unités différentes.  A  fait  preuve  dans  l'exercice de ce commandement des plus belles qualités de Chef, obtenant le maximum de tous ses subordonnés, grâce à son calme, son énergie et son courage. A combattue avec acharnement contre un ennemi supérieur en nombre et doté de moyens puissants en chars et en artillerie, à Luxeuil, Faucogney et au Col de Fourche, ne cessant le combat qu'à l'Armistice, après avoir défendu le terrain à pied et causé des pertes sérieuses à l'ennemi. »
Rapatrié le 15.05.1945, atteint par la limité d'âge, le 30.10.1945, le Colonel RÉTHORÉ se retira dans la région parisienne.
Il devait succomber à une crise cardiaque le 23 août 1962.
Chef de grande classe, il avait été avant tout un Soldat, exemple de droiture et de courage. 
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