Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Le blog de François MUNIER

Jacob Vigneron et les loups

10 Septembre 2010 , Rédigé par François MUNIER Publié dans #Généalogie familiale, #Lorraine, #Moselle

http://christiane.munier.free.fr/photos/loups.htm

Jacob Vigneron fut un personnage extraordinaire, une force de la nature, d'un courage à la limite de l'inconscience. Vivant à Saint-Avold (Lorraine annexée), il devait faire son service dans l'armée allemande et avait été incorporé dans la garde impériale  compte tenu de sa stature. Il préféra déserter et fut condamné à mort. Malheureusement, personne n'a pris la peine de recueillir tous ses souvenirs et on ne sait plus très bien s'il fut condamné à mort pour désertion seule ou aussi pour violences (avec meurtre ?) sur les gendarmes venus l'arrêter. Il passa alors en France. Mal conseillé, il ne savait pas qu'il pouvait être redevenir Français très facilement, étant né français. Il s'engagea dans la Légion étrangère. Ensuite, ouvrier à Nancy, il connu mon arrière-grand-mère...et ma grand-mère Élisabeth naquit.

 

Ce souvenir a été recueilli par Madeleine Mathis, la fille aînée d'Élisabeth et tapé à la machine par Arlette Clément.

 

Souvenirs.

HISTOIRE DES LOUPS 

Ecrite à la machine par Arlette en 82

Parmi toutes les aventures qui ont illustrées la jeunesse de mon grand-père il ne faut certes pas oublier l'histoire des loups.

Combien de fois l'ai-je entendue citer en cet hiver si terrible de 79 - 80, si terrible dans les forêts de Lorraine, surtout dans la Moselle, où il n'y avait plus de possibilité de communication entre les bourgs et les villages. Il fallait un grand courage et une obligation absolue pour sortir. Partir pour le pays voisin était une aventure.

C'est ce qui arriva à mon grand-père. Un cas de force majeur l'obligea un matin à quitter la maison afin d'accomplir une mission au village voisin. Voisin C'était vite dit, il fallait traverser une grande forêt recouverte de neige, ce qui ne favorisait pas une marche hâtive. Et comme je vous l'ai dit, les loups affamés par l'hiver, rodaient et avaient pris quartier.

Le voilà donc parti pour vaincre la neige et sa peur...., car bien entendu il n'était pas un surhomme et pour une fois il avait peur.

Le voyage aller malgré le froid se passa assez bien . A près avoir fait sa course, il prit le temps de se reposer cher son hôte. Mais il fallut songer à repartir, car le soir tombait vite. La neige redoublait de fureur dans sa chute. Son hôte le brave homme le trouva bien sans défense, malgré un gros bâton,aussi lui remit-il deux pistolets chargés. Chacun sait que les loups en petit groupe sont assez peureux, devant un homme debout et qui fait du bruit, à condition surtout qu'il reste debout.

Mon grand'père se met donc en route, avançant à grand-peine sur la neige amassée depuis des jours et des jours. Dans la journée le ciel s"était un peu éclairci. Mais vers quatre heures la neige tombe de nouveau, elle est tenace cette neige, aveuglante et le garçon a bien du mal à suivre son chemin, heureusement il est né dans ce pays et reconnaît presque chaque arbre qui bordent le chemin. Mais la marche est difficile; des paquets de neige se forment à tous moments sous les bottes, il faut taper des pieds et recommencer souvent ce manège. A cette époque les skis n'existaient pas.

Et voilà le moment crucial de l'aventure: " dans un coup ", selon l'expression favorite et coutumière de mon grand-père; un long hurlement se fait entendre derrière lui, puis un second encore plus sinistre. En l'espace d'un éclair, il comprit, les loups se rapprochent, son coeur bat plus vite et pour être sûr du danger, il jette un coup d'oeil derrière lui. Il ne faut surtout pas perdre la face, il faut tenir debout coûte que coûte. La sueur l’inonde la neige l'étouffe, il frissonne, sa marche est moins assurée; il glisse, puis se reprend, tandis que derrière les loups calmement le suivent à distance assez rapprochée. Il faut tenir. Où est-il exactement? Il n'en sait plus rien, des arbres et encore des arbres, et cette neige qui continue de l'aveugler. Une peur panique s'empare de lui, il tremble sur ses jambes, le chemin est de plus en plus obstrué. La peur le tenaille, sa gorge est sèche.

Le soir gris fait place à une nuit sans étoiles. Comment va-t-il tenir? Jamais de sa vie il n'a eu si peur; il entend maintenant le souffle des loups se préparant à l'attaque. Un loup on peut en avoir raison avec un bon bâton, mais deux c'est autre chose, c"est quasi impossible. Et puis ces loups ont faim par cet hiver épouvantable. Mais miracle.... tout à coup les loups semblent ralentir leur marche, le chemin semble aussi s'écarter. Au yeux du garçon épuisé apparaissent soudain des masses grises en bordure de la route. Il était enfin au village, ...sa maison proche.

Et c'est une masse de glace et de neige qui enfonce la porte de la maison, s'engouffre dans la grande cuisine éclairée par les flammes de l'âtre, où cuit une soupe réconfortante. Vite il s'affale sur une chaise; frères et soeur,; s'empressent afin de l'aider à se débarrasser de sa carapace de froid. On retire les bottes durcies par le gel, tout à coup , mon grand-père pousse un grand cri en se dressant tel un ressort  les pistolets§ oui, ils étaient là serrés sur son estomac. Ces pistolets prêtés par un homme prévoyant et prudent. Mais dans sa grande peur il avait complètement oublié ce meilleur moyen de défense! Comme quoi en aucun cas il ne faudrait perdre son sang-froid! Et c'est un garçon tranquillisé mais un peu vexé qui se mit ce soir là devant son assiette de soupe.

Son bon tempérament lui ferait vite oublier sa mésaventure.

Jacob Vigneron et les loups
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article